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Colloque « Textualités et spatialités », URCA, 20-21 octobre 2021

APPEL À COMMUNICATION

Colloque « Textualités et spatialités »

Céline Bohnert – Yann Calbérac – Jean-Louis Haquette

URCA-CRIMEL

20-21 octobre 2021

Présentation du colloque « Textualités et spatialités »

Université de Reims Champagne-Ardenne – CRIMEL / Institut
universitaire de France

« L’espace vous intéresse ? Faisons-le craquer. »
Samuel Beckett, L’innommable

Dès la fin des années 1980, le géographe Edward Soja constate qu’un tournant spatial (spatial turn) s’impose massivement (Soja, 1989), au point de devenir :

« Un paradigme spatial dans les sciences sociales qui a mis en évidence des phénomènes, des dynamiques, des répartitions échappant à d’autres types d’appréhension. Ce courant théorique a permis la circulation de concepts et de modèles entre la géographie et les disciplines comme la sociologie, l’anthropologie, l’histoire, la philosophie, les cultural studies, les colonial et post colonial studies. L’espace, le territoire, le lieu, la frontière, le centre, la périphérie, l’échelle, la carte, le réseau, le local et le global ont été utilisés comme des concepts opératoires, des métaphores heuristiques pour apporter un surplus d’intelligibilité à des phénomènes complexes et multidimensionnels. » (Jacob, 2014, p. 43)

Dès lors, l’espace s’est invité dans le champ des sciences humaines et sociales, au point de devenir une catégorie d’analyse à part entière. Les études littéraires ne sont pas en reste : de multiples courants émergent ainsi en leur sein pour faire de l’espace un programme de recherche, qu’il s’agisse de la géocritique (Westphal, 2007), de la géographie littéraire (Collot, 2014) ou encore de l’étude des spatialités littéraires (Rosemberg, 2016). Ces courants cherchent tous à renouveler les approches des textes et de la textualité en mettant en lumière l’apport d’une approche spatiale. Mais les métaphores spatiales relèvent aussi de ce que Hans Blümenberg appelle des métaphores absolues, ces images au-delà desquels la pensée abstraite ne peut pas remonter : comment désigner les textes et l’écrit sans référence à l’espace ?

Si d’un côté le spatial turn invite à interroger les enjeux épistémologiques que recouvre l’extension à de nouveaux objets d’une terminologie, de concepts et de méthodes issus de la géographie, l’emploi massif de métaphores spatiales pour désigner les textes et l’écrit dans la langue commune questionne nos représentations des textes dans leurs dimensions intellectuelles, sensibles et matérielles. Quelles métaphores spatiales organisent notre rapport à l’écrit : vers quelles formes d’espace ces images font-elles signe ?

Ce colloque explorera les différentes modalités de la rencontre entre l’espace et l’écrit depuis l’Antiquité. Plusieurs champs peuvent ainsi être explorés (sans que cette liste ne soit limitative) :

Les supports textuels et la spatialité
Les textes, qu’ils soient diffusés sous forme de manuscrits, d’imprimés ou d’objets numériques, circulent depuis des espaces de production et d’écriture, jusqu’à des espaces de réception et de lecture, en passant par des espaces de conservation ou de diffusion (qu’il s’agisse de lieux, comme la bibliothèque, ou d’objets, comme l’anthologie). La matérialité des textes appelle l’analyse de leurs circulations dans l’espace (espaces géographiques, culturels, linguistiques, sociologiques voire confessionnels), mais aussi de la circulation en leur sein par le jeu des tables, des sommaires, des index, des notes. Quelles traversées des textes les formes matérielles de l’écrit organisent-elles ? Et quelles opérations intellectuelles ces supports matérialisent ils dans l’espace ?

La présence des textes dans l’espace du réel
Notre rapport aux textes passe par la médiation d’institutions, visibles et invisibles. Ces médiations sont elles-mêmes signifiées par une géographie concrète : celle des bibliothèques et des lieux de conservation, consultation, diffusion des écrits. Quels lieux assigne-t-on à l’écrit, comment la géographie urbaine et l’architecture reflètent-ils le rapport d’une société à ses textes ? Par ailleurs, où commence le texte dans l’espace social saturé de signes ?

« Écrire (dans) l’espace »
Les textes permettent la mise en mot du réel et sa prise en charge dans différents actes de langage, différentes formes littéraires. Leur mise en page est aussi une façon de créer une expérience inédite de l’espace. Dire l’espace signifie aussi jouer avec les noms propres qui le désignent, avec ce qu’ils évoquent, avec leurs classements ou leur disposition dans l’espace d’un texte, d’une carte ou d’un graphique. Comment l’espace est-il ainsi mis en mot, en page et en images ?

Les liens entre métaphorisation spatiale et réalités textuelles
L’espace est également mobilisé comme une métaphore féconde pour explorer les textes, les supports textuels et le rapport que nous entretenons avec eux. On peut penser aux métaphores architecturale (qui font du frontispice une forme de monument, des éléments du paratexte des seuils et du livre une galerie, une bibliothèque, un musée ou une cathédrale) ou aux métaphores urbaines (qui font du lecteur ou du collectionneur un flâneur, du poème une « Zone »).

L’espace au fondement de la poétique
Certaines œuvres littéraires s’élaborent par référence à des réalités spatiales : la marelle, l’échiquier sous-tendent alors non seulement le parcours de lecteur, mais aussi la poétique, l’esthétique et le sens même de l’œuvre. Comment les textes font-ils de l’espace une réalité poétique

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