COLLOQUE
Colloque/Workshop LEA!
« Urbi et orbi. Lire les villes, vivre en littérature »
AVEIRO, Université d’Aveiro,
16-20 octobre 2019
Parmi les « chronotopes » (Bakhtine) de la littérature, les villes sont sans doute à privilégier. La ville est un thème en littérature mais aussi une forme. Sans doute peut-on « habiter » un texte comme on habite une ville. Si d’importants travaux ont été consacrés à la « sémiologie urbaine » (Barthes), il reste, toutefois, à s’interroger sur étrange connexion qui se fait quand, dans un texte, le thème de la ville vient inférer avec la forme du texte. Imaginer un texte, un récit, une fiction comme une autre sorte de tissu urbain, c’est attribuer à ce qu’on lit une lisibilité, c’est organiser l’espace du texte comme une page habitable. « Le vieux Paris n’est plus », écrit le poète qui nous fait alors visiter de fascinantes ruines. Un autre ajoute : « Et à l’aurore, armés d’une ardente patience, nous entrerons aux splendides villes ». Les villes, clairement, font rêver poètes, écrivains, romanciers. Ecrire est-ce autre chose que d’arpenter infatigablement leurs avenues, boulevards, ruelles, impasses ? Villes réelles, lieux fictifs. De la topologie à la mythologie, il n’y a, en somme, qu’un pas. A l’ère du numérique, nous avons par ailleurs à notre disposition de très performants outils de modélisation (« réalité virtuelle ») nous permettant d’appréhender autrement la complexité de l’urbanité littéraire. Le texte est alors un point de départ, un stimulus. L’ordinateur m’aide à simuler, à visualiser l’espace du roman, de la fiction. Je me promène dans le Dublin de Joyce, le Paris de Balzac, le New York de Dos Passos, le Lisbonne de Pessoa. La ville est une forme, je visualise cette forme et je vis ma lecture comme une autre sorte de video game. La ville est un lieu de vie, je vis ma vie dans les fascinantes villes de la littérature.
Notre rencontre aura donc pour objet la réflexion sur les villes européennes et autres, ces loci memoriae que tant d‘écrivains ont bâtis dans leurs livres (où nous nous promenons avec plaisir ou inquiétude, dans les pas de Baudelaire, de Joyce, de Modiano, de Michel Butor, de Nicolas Bouvier, de Sebald, de Lilar, de Syvie Germain, de Pessoa, de Lobo Antunes, et de combien d’autres) , en quête maintenant de nouveaux territoires de lisibilité, où les espaces de mémoire coexistent avec ceux de l’innovation. On peut parler de la ville « en termes de signification »; le numérique, à présent, trace de nouvelles cartographies littéraires urbaines européennes qu’il s’impose de creuser. Cette rencontre, nous l’espérons, nous permettra de mieux mettre en évidence les différentes contributions à l’oeuvre, en ce moment, pour l’édification d’une nouvelle histoire littéraire, européenne, et dont la forme et la figure de la « ville univers » serait une des clefs de voûte.
http://lea.letras.ulisboa.pt/?p=1332